Coronavirus : La Côte d’Ivoire est mal partie

Situation de la CI au 25/03/2020

Au moment où je m’adonne à cette tâche ingrate de « présager » le pire, notre pays la Côte d’Ivoire vient d’enregistrer 16 nouveaux cas, faisant passer le nombre total de cas contaminés dans le pays à 90. Les mesures prises par les pouvoirs publics pour endiguer ce fléau mondial n’arrivent toujours pas au meilleur moment.

1- Une grande hésitation dans la prise des mesures
Annoncées pour être fermées, les frontières ivoiriennes ont mis le temps des nombreuses ambiguïtés avant de se voir murées aux pays enregistrant plus de 100 cas au Covid 19. Ce rééchelonnement contre-productif et très inopportun a eu pour mérite de permettre à la diaspora du pays de rentrer et d’être la principale vectrice à partir de laquelle le mal a atteint le pays. Même si les premiers cas ont été le fait de personnes ayant récemment séjourné en Europe, il n’en demeure pas moins que les proportions que le mal est en train de prendre sont imputables à la grande masse de nationaux vivant en Europe et rentrée ces derniers temps.
Pensant prendre le taureau par les cornes, le gouvernement ivoirien avait entrepris de confiner les personnes qui rentraient dans le pays à l’INJS, le temps de s’assurer de leur statut (positif ou negatif) au Covid 19. Malheureusement, le gouvernement a cédé aux complaintes de certaines de ces populations qui s’offusquaient de cette mesure. Le renoncement passif à cette mesure somme toute barrière a prêté le flanc à une évolution vertigineuse du nombre de cas dans notre pays.
Aujourd’hui encore, au moment où Abidjan reste la seule ville officiellement touchée, le gouvernement renonce à isoler la ville du reste du pays. Une mesure pourtant saluée et qui devrait rentrer en vigueur ce 26 mars est retardée au dimanche prochain. Cette propension au report est jusqu’à ce jour le facteur incongru dans la démarche des pouvoirs publics sapant par la même occasion l’efficacité des dispositions prises. En effet, l’on est à ce stade en droit de penser que ce délai supplémentaire vise à accorder aux abidjanais la possibilité de regagner l’intérieur avant que l’isolement n’intervienne. En témoigne la grande ruée actuelle dans les gares à Abidjan pour regagner l’intérieur du pays. Comme dans le cas des diasporas, cet autre ajournement « aura le mérite » très pervers de déporter le virus à l’intérieur du pays. C’est là l’inquiétude majeure.

2- Voilà pourquoi l’intérieur ne devrait pas être touché

Dans ce que Hägerstrand propose comme modèle de diffusion, nous sommes encore au stade 1 de propagation de la maladie au coronavirus. Ce qui signifie que dans les jours à venir, le risque serait de voir les villes proches d’Abidjan connaitre leurs premiers cas. Et avec la possibilité offerte aux abidjanais de fuir la capitale pour l’intérieur, toute la Côte d’Ivoire est désormais menacée d’enregistrer des cas de Covid 19. Ce qui n’est pas du tout à souhaiter. En réalité, quand l’on voit le nombre de décès dans les pays comme l’Italie, l’Espagne, la France et même les Etats-Unis, on ne peut que craindre « la tragédie » dans un pays comme le nôtre. Et pour cause, en dépit de tous les efforts de l’Etat, les plateaux techniques de nos hôpitaux restent fortement peu améliorés comparés à ceux des pays du nord. Si malgré leurs offres de soin, ces pays sont aujourd’hui dépassés par la rapidité du Covid 19, une grande inquiétude doit nous traverser.
En réalité, la ville d’Abidjan est mieux pourvue en centres de santé susceptibles de recevoir des cas que les autres villes de l’intérieur. C’est pourquoi, tant que les cas étaient localisés à cette échelle micro, il était plus facile de les suivre et de les prendre en charge. Malheureusement, cet « exode urbain » à l’assaut certainement du margousier (neem) ne fait qu’augmenter la crainte en des lendemains plus difficiles à supporter. Et ce sont les familles dans les villes et villages du reste du pays qui courent désormais le risque presqu’inévitable d’être exposées au Covid 19.
Toutefois, l’espoir existe quand même. L’espoir, c’est déjà de respecter pieusement les mesures barrières déjà édictées. L’espoir, c’est aussi de se servir des « leçons apprises ». C’est-à-dire s’inspirer du modèle de gestion de la Chine qui aujourd’hui a, ou presque vaincu la maladie. Ces leçons pourront apporter plus de célérité et de maitrise dans la gestion de cette crise sanitaire. L’espoir, c’est aussi vers la Chloroquine. Notre pays va certainement scruter la même piste que la France de l’infectiologue Didier Raoult.

DÉGNIMANI YÉO